Frontiere entre le Mexique et les États-Unis, Mexicali , Google Earth, 2020.


Aux étudiants du studio S2 – Pascal Urbain

Grace à Maxime Grégoire, nous avons la chance d’avoir une analyse structurelle très complète de la villa Savoye. On ne peut qu’encourager ceux qui n’auraient pas encore fait cette analyse à copier sur lui et à l’en remercier grandement. Je m’arroge le droit de le féliciter en premier.

Nous avons pas, en revanche, d’analyse pittoresque, c’est-à-dire une présentation séquentielle des lieux vus «  à 1,70 m du sol  », pour reprendre les termes de Le Corbusier. On trouve, dans L’illusion des plans, plusieurs analyses de villas pompéiennes et de l’Acropole. On trouve aussi des analyses plus scolaires, en particulier sur Case Study House 21.

Enfin, peu de sites élargis sont présentés clairement. On peut craindre que certains d’entre vous n’aient pas cherché à trouver leur maison sur Street View, à se promener autour, à jauger l’environnement, à tracer la parcelle de terrain concerné. Il est très facile de trouver le site quand on a une adresse précise, ou quand la maison est très célèbre, parfaitement géo localisée en conséquence. Une autre solution consiste à chercher des photos récentes, dont les métadonnées contiennent la géolocalisation. J’avoue ne pas savoir comment exploiter ces métadonnées sans le logiciel spécialisé dans le traitement d’images dont je dispose. Mais je crois me souvenir qu’il y a des applications gratuites qui permettent d’y accéder aussi bien. En dernier recours, avec un nom de ville ou de quartier, on cherche sur une vue satellitaire. Explorer un territoire à vol d’oiseau, y chercher une figure, en découvrir d’autres, n’est jamais du temps perdu quand on se destine à l’architecture. Les formes urbaines et géologiques se mêlent de façons fascinantes. Pour s’initier, on ne saurait trop conseiller le Midwest américain, où les rivières sinueuses traversent paresseusement le grand quadrillage agricole. Il est également passionnant de suivre la frontière entre le Mexique et les États-Unis, de Tijuana à Yuma. Un des deux pays frontaliers est plus riche que l’autre. Devinez lequel…

Le projet enfin  : c’est le grand absent de cette première semaine. Mais plusieurs d’entre vous ont déjà un peu crayonné. C’est fécond. Continuez. Je m’inquiète aussi pour ceux dont je n’ai pas vu les travaux, et j’espère de leurs nouvelles cette semaine. Il m’arrive, pour illustrer un de mes commentaires, de faire des collages. C’est, pour moi, une façon rapide d’attraper au vol une forme fugitive, ni plus ni moins qu’un croquis à main levé. En aucun cas ce ne sont des projets. Les projets, c’est à vous de les faire.

Un texte viendra prochainement, mais place au projet, d’abord.

À voir vous lire.

Alice Duran  : Villa Buggenhout, Office KGDVS, 2012

La villa Buggenhout, en Belgique, est une maison privée. Elle a été créée en 2010 par la société OFFICE Kersten Geers David Van Severen. L’enceinte est fermée par une clôture modulaire en acier, elle fait partie intégrante du projet et défini le volume de la maison. Le jardin négligé environnant n’est pas inclus, et fonctionne comme un accès automobile autour de la maison. Le logement lui-même est composé de deux niveaux.
Le premier niveau est une «  maison extérieure  » ouverte au rez-de-chaussée et le deuxième est une «  maison intérieure  » fermée au premier étage, avec vue sur les bois et le paysage rural. La maison extérieure est conçue comme une villa patio avec jardin. Ses doubles parois épaisses – deux couches porteuses de brique standard, peintes en blanc – plate-forme en béton qui forme la base de la maison intérieure.
La maison intérieure est un ensemble compact de chambres. Ceci est conçu comme une boite en bois qui couvre le plate-forme, qui est rendue étanche en la couvrant complètement avec une membrane en plastique sombre. Tous les détails de ce projet sont conçus de l’intérieur  : les immenses fenêtres coulissantes s’ajoutent aux façades de telle manière que les cadres sont invisibles et n’imposent pas aux vues impressionnantes. Celles-ci sont orientées vers le paysage rural encore ouvert, tandis que les maisons voisines restent relativement invisibles.
En déplaçant délibérément la clôture des bords de la limite de propriété, le logement devient en fait «  autonome  » – un luxe rare en Belgique parcellaire.
La maison est formée par 9 carrés, donnant toutes les mesures de chaque pièce, les volumes créer par les poteaux verticaux.

Équipe de construction  :
entrepreneur général  : CS Bouw, Schoonaarde
entrepreneur bois (structure et murs)  : Schrijnwerkerij Dam-Baert,Zele , entrepreneur bois (portes et placards)  : Thierry Lagae, Bruxelles
entrepreneur en acier  : Mertens, Grimbergen
fenêtres entrepreneur  : FMP, Duffel

Précisions sur le travail de l’équipe OFFICE par Juan Antonio Cortès


«  OFFICE place souvent les limites entre les espaces, entre les territoires, au centre de concepts architecturaux, jouant souvent sur la contradiction entre le mur impénétrable et la porte ouverte. […] D’ailleurs les projets les plus intéressants de l’agence introduisent souvent la création délibérée d’une nouvelle limite, indépendante des limites contraintes et existantes du lieu. L’ancienne et la nouvelle limite génèrent donc un espace, une épaisseur souvent utilisée pour intégrer différentes fonctions du projet. […] On peut trouver dans le travail d’OFFICE de nombreux points communs avec la sculpture minimaliste, comme les rapports entre le plein et le vide, la répétition, les formes géométriques et modulaires, faisant référence à Donald Judd, Robert Morris et Sol LeWitt, parmi d’autres. De nombreux projets consistent en des espaces clos superposés à des espaces ouverts, ou encore en l’alternance d’espaces couverts ou non couverts. […] Dans son travail OFFICE utilise souvent la grille comme une matrice. […] Il est souvent mentionné l’importance d’établir un système de mesures pour les bâtiments.  »

Inspiration pour un lieu de méditation

Le lieu peut être une nouvelle construction mais aussi un aménagement tel que mobiliers, végétaux ou minéraux. Nous pouvons exprimer ce lieu de différente façon, pour le moment j’ai étudié la possibilité de suivre la grille présente dans la villa avec les 9 carrés pour produire un troisième étage.

Alice Duran, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Office KGDVS, Villa à Buggenhout, 2012.


Références


Jeu de la structure avec la lumière pour amener à réfléchir.
Les matériaux qui tamisent la lumière et le style japonais reposant.
Lieu de méditation proche de la nature.

Commentaire  : Pascal Urbain

Pour l’instant, il y a une petite compilation d’information et de documents, mais pas encore d’analyse.

Office KGDVS, em>Villa, Buggenhout, Belgique, 2012.


Un troisième étage serait audacieux. Mais lequel  ?

D’après Office KGDVS, em>Villa, Buggenhout, Belgique, 2012, et Le Corbusier, Vila Savoye, 1929-1931, Pur 2020.


Une forme sur le toit, c’est dangereux. Ça casse la rigueur du plan à neuf cases, mais surtout, ça créé une sorte de symétrie verticale, jamais heureuse, d’un étage foncé et fermé au milieu, entre deux étages clairs et ouverts.

D’après Office KGDVS, em>Villa, Buggenhout, Belgique, 2012, et Le Corbusier, Vila Savoye, 1929-1931, Pur 2020.


Briser cette symétrie et possible, mais une forme sur le toit, en première année  ?
Ça mérite d’être étudié une semaine avant de s’engager…

D’après Office KGDVS, em>Villa, Buggenhout, Belgique, 2012, Pur 2020.


En solution de replis, on peut imaginer un étage aveugle, introverti, seulement éclairé par un carré de ciel bleu. Ça colle avec la méditation. Mais il ne faut pas que la surface bâtie excède la surface maximale prescrite dans le programme.

Alice Scharffe  : Maison Eames, Ray & Charles, 1949

Charles Eames (1907-1978) et Ray Eames (1912-1988 ) sur une Velocette.


Charles Ormond Eames Jr., dit Charles Eames, est un designer, architecte et cinéaste américain, né le 17 juin 1907 à Saint-Louis (Missouri) et mort dans la même ville le 21 août 1978. Il a principalement travaillé avec sa femme Ray Eames au sein du Eames Office. Créant du mobilier devenu iconique, il est considéré comme un designer majeur du XXe siècle, car il a su faire évoluer le design vers la production de masse et apporter des innovations techniques. Parmi ses travaux sur le contreplaqué moulé figurent la chaise LCW et le fauteuil Lounge Chair & Ottoman, et, parmi ses travaux sur la fibre de verre, La Chaise et les Stacking Chairs. Sur le plan architectural, il a conçu la Case Study House no 8, le Showroom pour l’éditeur de mobilier Herman Miller et le Pavillon IBM de la Foire internationale de New York (1964-1965). Polyvalent, Charles Eames est actif dans de nombreux domaines créatifs. Il conçoit également des documentaires et films publicitaires, ainsi que des jouets.

Les Case Study Houses

Le programme des Case Study Houses est une expérience architecturale visant à construire des maisons modernes et économiques. Il se déroule sur la côte ouest des États-Unis, principalement autour de Los Angeles entre 1945 et 1966.
Lancé à l’initiative de John Entenza, rédacteur en chef de la revue Arts & Architecture, le Case Study House Program a pour objectif de concevoir et de construire des modèles de maisons individuelles économiques et fonctionnelles en prévision du boom provoqué par la fin de la Seconde Guerre mondiale et le retour de millions de soldats. L’annonce du Case Study House Program affirme que «  les maisons doivent pouvoir être reproduites et en aucune façon être des créations particulières.  » puis «  les maison[s] […] ser[ont] conçue[s] dans l’esprit de notre époque, en utilisant dans la mesure du possible, de nombreux matériaux et techniques issus de la guerre, les mieux adaptés à l’expression de la vie de l’homme dans le monde moderne.  »
Les architectes sollicités sont parmi les importants de l’époque  : Richard Neutra, Raphael Soriano, Craig Ellwood, Charles et Ray Eames, Pierre Koenig et Eero Saarinen.
Au total, 36 projets sont conçus entre 1945 et 1966 (34 maisons individuelles et 2 appartements). Certains ne sont finalement pas construits, d’autres subissent de significatives transformations pour s’adapter aux besoins des clients.

La Maison Eames, Case Study Houses N°8 – Intention, Histoire, Caractéristiques

Situation
Le site de cinq hectares où ils ont construit la maison est située à Chautauqua, boulevard Pacific Palisades, Santa Monica, en Californie, dans une zone proche de la ville de Los Angeles.
La Maison Eames se trouve sur une colline surplombant la baie de Santa Monica et l’océan Pacifique, près de grands eucalyptus préexistants que les architectes ont décidé de garder car ils fournissent un beau jeu de lumière, d’ombres et de reflets avec la maison.

Concept
La maison a une double forme, elle agit à la fois comme le conteneur et comme le contenu. L’espace est un conteneur dans lequel deux personnes vivent et travaillent, mais il représente le contenu des idées des personnes qui sont ses concepteurs, mais également ses habitants. «  Nous nous intéressons à la maison comme instrument fondamental pour vivre à notre époque, la maison comme solution au besoin humain d’abri qui est contemporain du point de vue structurel, la maison qui, surtout, tire profit des meilleures techniques d’ingénierie de notre civilisation hautement industrialisée. Si d’autres attitudes présentent des possibilités diverses, cette approche semble être celle qui peut être défendue sans préjugés comme la solution moderne, lucide et réaliste aux besoins de logement. L’histoire de la maison est trop évidente pour être repensée. Cependant, ce que nous essayons de dire, c’est que toutes les circonstances et conditions nécessaires pour pouvoir combattre le problème du logement en série à une échelle globale et complète avec plus que de bonnes possibilités de succès sont maintenant en place  » (Charles Eames).
La Maison Eames est née lorsque les Eames déménagent dans une banlieue de Los Angeles, où ils vont construire leur propre maison, dans laquelle ils vivront jusqu’à leur mort. Au cours de ces années, ils développent et construisent l’«  objet  » qu’ils ont imaginé et utilisé. Par conséquent, ils adaptent la maison aux besoins qui se présentent. C’est l’origine du premier concept architectural valable aujourd’hui  : la flexibilité. Bien que ce logement ait été conçu pour être un prototype, c’est en fait le reflet extrêmement personnel de la coexistence ininterrompue du travail et des loisirs qui a caractérisé le mode de vie exceptionnel de ces deux remarquables designers américains.

Espaces
Le résultat de la coopération des Eames consiste en deux bâtiments adjacents de double hauteur, l’un utilisé comme zone résidentielle, et l’autre comme atelier-studio. Les volumes standardisés et les volumes autoconstructibles répondent à une intention claire de simplifier la définition d’une maison. Pour les Eames, créer une cuisine a la même valeur que créer une chaise, les deux sont des objets et peuvent être «  itinérants  ». Contrairement aux bâtiments de Frank Lloyd Wright, où ses meubles ne peuvent se trouver qu’à cet endroit, ici, il donne une image de mutabilité. Les chambres se trouvent sur une mezzanine qui s’ouvre sur le salon, sous lequel se trouve la bibliothèque. L’atelier se trouve au rez-de-chaussée, indépendant du volume dédié à la maison, mais en même temps relié par la terrasse. Le salon, la cuisine, l’atelier et la salle de stockage sont situés à cet étage. Dans la partie supérieure se trouvent les chambres et la salle de bain. Cet étage est relié au reste de la maison par des escaliers et des balcons qui permettent la double hauteur des salles de séjour.

Structure
La structure de la maison Eames a été installée en seulement 90 heures, en utilisant des structures en acier et composites, ainsi qu’un petit mur de soutènement en béton. Eames a calculé qu’en retirant son studio, le coût par pied carré de la maison était de 1 dollar au lieu des 12 habituels pour une construction traditionnelle en bois. Le bâtiment est de caractère simple et met l’accent sur la structure. Il est animé par les textures, les couleurs et les matériaux orchestrés par Ray Eames.

Matériaux
Démontrant les possibilités offertes par la technologie industrielle tant dans la fabrication des matériaux que dans l’adoption des méthodes de construction, la maison a été entièrement assemblée avec des éléments préfabriqués qui, y compris l’acier, le verre, l’amiante et les panneaux Cemesto, ont suivi un système modulaire. Au lieu d’utiliser des matériaux traditionnels, ils utilisent des matériaux industriels pour deux raisons  : en raison de leur relation avec l’industrie, étant des concepteurs de meubles, cela leur permet de standardiser la construction et parce que les matériaux industriels leur permettent d’autoconstruire leurs maisons. Ce sont deux termes qui sont également très actuels dans le monde de l’architecture. Les enceintes étaient faites de tôle ondulée, de panneaux de fer-ciment et de charpenterie métallique avec du verre. L’extérieur de la maison est constitué de panneaux de verre transparent ou de panneaux de fibre de verre translucide combinés à des panneaux de bois, d’amiante et de cemesto peint dans des tons primaires ou blancs et parfois recouvert de stuc mélangé à de la feuille d’or.
Les fenêtres et les portes sont en aluminium industrialisé, tout comme l’acier utilisé pour le toit et la terrasse.

Sources
https ://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Eames https ://fr.wikipedia.org/wiki/Case_Study_Houses https ://fondarch.lu/charles-et-ray-eames-leurs-carrieres-et-realisations/
https ://es.wikiarquitectura.com/edificio/casa-eames-case-study-house- no8/ ?xdomain_data=Ry4COri0f%2Fpwtxpy%2Ft3jpP8gVaT7wLM5HOUo8fbU6e%2Fd9sKwq0gicix%2B jkg%3D
https ://www.cardis.ch/fr/magazine-immobilier/2014/ils-ont-change-notre-facon-d-habiter-vol-i- case-study-8-eames-house
https ://static.wixstatic.com/media/f0e494_a70d3eb79014427ab377647f49933662~mv2_d_6623_46 78_s_4_2.jpg/v1/fill/w_1600,h_1130,al_c,q_90/file.jpg

Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Office KGDVS, Villa à Buggenhout, 2012.


Commentaire  : Pascal Urbain

Je me suis de rajouter Ray à Charles. Ils travaillaient ensemble, ils s’affichaient ensemble, et seul le machisme du temps a mis Charles en avant. La biographie mérite d’être remaniée en ce sens.

L’analyse est correcte, sans faute, mais sans trait saillant. Elle mériterait des dessins analytiques, illustrant une d’approche structurelle et pittoresque du bâtiment.

Il est possible que l’analyse paysagère et architecturale – fond planté d’eucalyptus, trames régulières, organisation linéaire, potentiellement étirable, reproductible – conduise à un parti ou, comme c’est plus fréquent, légitime et enrichisse un parti préétabli. Le bâtiment est composé comme une locomotive et son tender (wagon de réserve de combustible), guidés par un rail (la restanques). En avant comme en arrière, on peut y ajouter les wagons qu’un voudra, dès lors que les rythmes sont respectés.

Ray et Charles Eames), Maison Eames, Case Study House 8, Santa Monica, 1945-1949, Vue depuis l’entrée de la Fondation Eames.


Et ça tombe bien  : à l’arrière du bâtiment, c’est-à-dire à l’entrée de ce qui est devenu la Fondation Eames, il y a une sorte de petit pavillon d’on ne sait quoi, qu’on pourrait refaire à la façon de Eames, ou pas…

D’après Ray et Charles Eames, Maison Eames, Case Study House, 8 Pacific Palisades, Los Angeles, Californie, Usa, 1945-1949, Extension, Pur 2020.


Sinon, les esquisses 6 et 7 ne sont pas sans intérêt, mais très difficile à dessiner.

Candice Joly  : Villa Müller, Adolf Loos,1928-1930

Construite en 1928 pour un ingénieur, elle est l’occasion pour Adolf Loos d’appliquer sa théorie selon laquelle l’espace n’est pas divisé en pièces sur différents étages seulement, mais en cube où chaque espace se divise en plusieurs niveaux.
Elle est très sobre à l’extérieur mais très riche à l’intérieur pour éviter un étalement de richesse.

Candice Joly, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Adolf Loos, Villa Müller, 1928-1930.


Commentaire  : Pascal Urbain


L’analyse manque encore de presque tout. Cela étant dit, il n’est idiot, dans un bâtiment orienté nord-sud, d’installer une petite annexe sur l’axe perpendiculaire est-ouest.

Adolf Loos (1870-1933), Villa Müller, Prague, 1928-1930, Street View.


Il y a effectivement, à droite de la façade d’entrée, un bout de jardin intéressant en contrebas de la rue. On n’en voit malheureusement pas grand-chose sur Street View, mais déjà un bel arbre au pied duquel un édicule pourrait se lover.

Adolf Loos (1870-1933), Villa Müller, Prague, 1928-1930, Street View.

Il y aussi, de l’autre côté, un escalier public qui permettrait un rapport intéressant entre ouverture et intimité.

Peu importe. À droite comme à gauche du bâtiment principal, cette très petite chose intime qu’on doit faire pourrait montrer le bout de son nez sur l’espace public, par sa proximité (à gauche) ou par sa hauteur (à droite).

Chloé Prinzivalli  : Villa Baizeau, Le Corbusier, 1928-1929

Cette villa se situe dans le périmètre du palais de Carthage auquel elle a été intégrée et abrite actuellement l’un des services de la présidence.

Cet édifice est l’un des tout premiers exemples d’adaptation du courant architectural moderniste en Méditerrannée et dans le monde arabe. Le Corbusier rencontre Lucien Baizeau à Stuttgart, en Allemagne, en 1928. Baizeau est alors à la tête d’une entreprise de matériaux de construction. Le Corbusier réalisera les plans sans se rendre sur le site. Avec son collègue P. Jeanneret, ils travailleront selon les descriptions de Baizeau.

Il va devoir présenter deux projets successifs car la première mouture sera rejetée par Baizeau.
Tout d’abord, sa volonté est de fuir le soleil et assurer la ventilation naturelle et constante dans la maison, épargnant la lumière excessive du soleil. La coupe apporte diverses solutions  : la maison porte un toit-parasol qui projette de l’ombre sur les chambres. Depuis le rez¬de-chaussée jusqu’en haut, les salles communiquent entre elles établissant un courant d’air constant.
Les murs aveugles dans la tradition tunisienne permettront de domestiquer le soleil alors que de larges baies vitrées s’ouvrent sur le golfe de Tunis. Il envisage la maison comme une entité globale favorisant la communication entre tous les espaces intérieurs et assurant une flexibilité fonctionnelle maximale, et ce du rez-de-chaussée jusqu’au niveau le plus haut. Ce projet n’a pas été exécuté.

Le Corbusier (1887-1965), Villa Carthage 1, Tunisie, 1929, Inconnu, Analyse architecturale.


Le Corbusier (1887-1965), Villa Carthage 1, Tunisie, 1929, Restitution Ms. R. Ind d’après les dessins FLC 24916 et 24917 , in T. Benton «  Le malita del cliente  », Rassegna 1980.


Le Corbusier (1887-1965), Vue perspective du premier projet de la villa Carthage, Janvier 1928.

Deuxième projet. Baizeau voulait un grand bloc rectangulaire avec des formes simples et épurées, des terrasses superposées ouvertes au nord-est avec une vue sur mer, privilégiant la couleur blanche. Ces caractéristiques sont emblématiques du style architectural moderne de Le Corbusier, pour qui le défi réel était de concevoir une villa adaptée au climat de la Tunisie.
La coupe n’a ici plus le même intérêt. Le principe de l’ossature portant les divers planchers est intéressant. Seuls les poteaux dessinent une enveloppe régulière à l’extérieur et chaque étage s’exprime à l’intérieur de ces poteaux sous une forme conforme aux fonctions, dessinant ainsi, des formes très variées d’étage en étage et mises à l’abri du soleil par la projection des terrasses qui les entourent. Même si elle demeure peu intégrée à son environnement, la villa Le Corbusier de Carthage a fière allure. Elle prend pour modèle l’architecture compacte d’une kasbah et la distribution spatiale d’une maison traditionnelle de la médina de Tunis. Comme un grand bloc rectangulaire.
C’est donc la deuxième intégrant les recommandations du maître d’œuvre qui sera retenue.

Commentaire  : Pascal Urbain

L’analyse manque de pièces graphiques. Les deux maisons doivent être analysées de façon très différentes  : de la première, nous n’avons que quelques esquisses, qui ne sont pas forcément cohérents les uns avec les autres, en sorte qu’une restitution est forcément hypothétique  ; de la seconde, qui a été réalisée, on en sait plus long.

S’agissant du premier projet, la restitution de R. Ind est conforme à deux dessins de Le Corbusier qu’on connait. Mais on trouve sur Internet une restitution de Guillermo Bernaldo de Quiros Gonzelo, très différentes, plus courtes que les documents portés à notre connaissance. Il serait intéressant d’explorer les pistes de ces restitutions concurrentes.

Le Corbusier (1887-1965), Villa Carthage, Tunisie, 1928, Restitution Guillermo Bernaldo de Quiros Gonzelo.


S’agissant du second projet, on dispose d’un plan produit par Baieau et adressé à Le Corbusier. Il serait intéressant de comparer, à la même échelle, le plan produit par Baieau et le plan réalisé, pour voir ce qui reste de l’un dans l’autre.

Plan de Lucien Baizeau pour la seconde proposition à Le Corbusier, Anoté par Le Corbusier, 19280504.


Pas de projet encore  ! Dommage. Si vous êtes en manque d’idée, je peux me permettre d’en proposer une  : on pourrait profiter du centenaire de la villa Carthage (2029) pour construire, accolé à la villa existante, un système de desserte (et de méditation) inspiré du premier projet.

Le Corbusier (1887-1965), Maison Domino, 1914, Maquette échelle 1, sous la direction de Rem Koolhaas, Venise, 2014.


Cela serait fait en bois, comme le fut la maison Domino à la Biennale de Venise de 2014.

Ce serait un travail sur ce que Colin Rowe a mis en évidence  : le problème du plan libre, c’est la paralysie de la coupe. Déjà dans la maison Domino, Le Corbusier ne se dépatouille pas de l’escalier, qu’il place à l’extérieur de la trame. L’escalier de la Villa Carthage réalisée est réinstallé dans la trame, mais ça reste une desserte de service, sans aucune ampleur architecturale. Le seul bel escalier du plan libre corbuséen, à double révolution s’il vous plait, c’est celui de la seule villa strictement parallélépipédique du Maître, la première villa Carthage. Ça beau d’en voir un fragment accolé à l’œuvre réalisée…

Dorine Hemery  : Villa Costa, Llivio Vacchini, 1993

Livio Vacchini (1933-2007), Maison Costa, Tenero-Contra, Suisse, 1993.


La villa Costa de Llivio Vacchini est une résidence expérimentale réalisée en 1993 à Tenero-Contra en Suisse. La villa s’inscrit dans une pente et s’ancre sous terre. Son toit semble plat mais il permet d’évacuer l’eau au milieu à travers une légère pente sur sa longueur, il n’est pas accessible. L’étage comprend 3 façades vitrées qui offre une vue imprenable sur les montagnes suisses. L’architecte choisit de faire un cadrage sous forme de panorama. Le bâtiment prend la forme d’un pavé de béton, les sanitaires représentent 1/6 de l’espace total de l’étage. Les éléments porteurs de la villa sont les 6 piliers en béton armé répartis sur la largeur du bâtiment (marqués en jaune). L’entrée se fait par un chemin de pierres face à un mur plein blanc, la porte est protégée de la pluie par un débord de toiture. Derrière cette porte se trouve un couloir qui mene vers la cuisine ouverte sur la salle à manger et l’espace de vie. L’espace de nuit est dans cette continuité. L’architecte a travaillé la circulation de la lumière ainsi que l’orientation. Cette lumière entre par un vitrage présent sur les façades Est, Sud et Ouest. Il n’y a qu’un mur central qui puisse délimiter de manière structurelle, les différents espaces. La configuration de la villa permettant de faire le tour de l’étage tout en ayant vu sur les montagnes ou que l’on soit en fait un espace majeur.

Commentaire  : Pascal Urbain

Votre analyse reste encore embryonnaire et il y manque des pièces graphiques.

Livio Vacchini (1933-2007), Maison Costa, Tenero-Contra, Suisse, 1993.


On reste aussi en attente d’une esquisse. La coupe est une clef d’entrée intéressante pour le projet. Du moins, c’est par un travail en coupe qu’on put émerger des projets intéressants avec ce bâtiment et ce programme.

Farouk Mohamed  : Maison Farnsworth, Mies van der Rohe, 1946-1951

Farouk Mohamed, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Mies van der Rohe, Maison Farnsworth, 1946-1951.



Bonjour, je vous envoie les croquis ainsi que la description de la maison Farnsworth. Les caractéristiques de la maison sont assez visibles. On a l’utilisation de verre, du sol au plafond qui ouvre l’intérieur de la maison sur son environnement naturel en essayant de se fondre dans la nature. L’intérieur donne l’impression d’être un espace ouvert coulant et s’insinuant autour de deux boîtes en bois l’une est la penderie et garde-robe, l’autre est le bloc salle de bain-cuisine. Le spacieux bloc cuisine semble une maison dans une maison car on a tout de même un grand espace libre et il y a des coins intimes par exemple comme les sanitaires qui sont placés de sort que les personnes de l’extérieurs ne puissent pas voir de travers. Pour mon projet, j’ai alors décidé de placer un coin de détente dans la parallèle de la maison de façon de ne pas laisser cette espace libre ,vide qui se situe sur la dalle qui est pour moi en trop et qui peut permettre de faire coin dans un registre différent puisqu’il permet aux visiteur qui souhaite franchir le passage pour entrer dans la maison mais il peut aussi directement accéder au coin de détente ce qui laisse le choix selon l’envie du visiteur.

Commentaire  : Pascal Urbain

Votre analyse, hélas, est un peu courte et manque de pièces graphiques. Inspirez-vous des analyses structurelles et pittoresques citées en préambule.

Ludwig Mies van der Rohe (1886-1969), Maison Farnsworth, Plano, 1946-1951, Pur 2020.


Votre proposition est en contradiction flagrante avec la composition de Mies van der Rohe  : chez, lui, c’est une série de curseurs qui semblent librement glisser de gauche à droite. Notez qu’il n’y a pas de poteaux aux angles du bâtiment, ce qui contribue à cet effet de glissement. Mais vous verrouillez ce dispositif glissant en vous installant perpendiculairement à l’axe de glissement. Ça fait penser à un sabot de Denver, cette entrave métallique qu’on fixe à la roue d’un véhicule en contravention pour l’empêcher de circuler – «  de Denver  », Colorado, en référence à la ville où le dispositif fut utilisé la première fois.

D’après Ludwig Mies van der Rohe (1886-1969), Maison Farnsworth, Plano, 1946-1951, Pur 2020.


Intuitivement, j’aurais réalisé une extension aussi glissante que les autres éléments du projet de Mies van der Rohe.

D’après Ludwig Mies van der Rohe (1886-1969), Maison Farnsworth, Plano, 1946-1951, Pur 2020.


Mais somme toute, s’agissant d’une installation temporaire, votre proposition ne serait pas mauvaise  : bloquer la perspective  ; contrarier la logique de la composition. C’est plus risqué. Ça doit être plus modeste  : un monolithe, une porte, un siège, et basta  ! En quoi  ? Pour être démontable, en bois ou en en métal. Mais avec quelle forme  ? Quelle texture apparente  ? Quelle couleur  ? Quelles proportions  ? À vous de voir. Hâtez-vous  !

DAP Studio, Bibliothèque municipale Elsa Morante Oratoire San Michel, Lonate, Ceppino, 2011.

Jeanne Maurel  : Maison Gaspar, Alberto Campo Baeza, 1992

Jeanne Maurel, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Alberto Campo Baeza, Villa gaspar, 1992.


La parcelle se situe dans un contexte verdoyant, peu dense. Elle se situe en hauteur, sur une colline, isolée de tout et partage son terrain avec une autre œuvre d’Alberto Campo Baeza – la Maison Guerrero – qui se rapproche beaucoup des caractéristiques de la Maison Gaspar.
Répondant à une volonté majeure de rupture avec l’environnement de la part des futurs habitants, l’architecte imagine une maison tranchant avec son environnement et totalement opaque à celui-ci. Il a été décidé de créer une enceinte fermée, un «  hortus conclusus  » ou un bosquet fermé. Telle une boite blanche dans cet espace naturel, la maison vient s’insérer et contraste avec la végétation omniprésente, laissant uniquement visible l’enveloppe blanche de deux prismes imbriqués. Depuis l’extérieur, un des deux volumes est perçu comme central, surplombant le second volume qui le contient.

La configuration introvertie de l’habitation, notamment la hauteur des parois verticales, génère une réduction extrême des rapports à son environnement. La perception de celui depuis l’intérieur est fortement limitée, orientée exclusivement vers le ciel et la cime des arbres avoisinants.
La maison, définie par quatre murs d’enceinte de 3,5 mètres, est basée sur un carré de 18 x 18 mètres divisé en trois parties égales. Seule la partie centrale est couverte. Le carré est ensuite divisé transversalement par deux murs de 2 mètres de haut en trois parties aux proportions A, 2A, A, les pièces de service étant situées sur les côtés. Le toit de l’espace central est plus haut, 4,5 mètres de haut.

Les 2 tronçons latéraux, abritent les espaces secondaires, les chambres et les services, s’ouvrant chacun à l’espace intérieur principal. Cette hiérarchie entre les différentes pièces est renforcée par la hauteur de la toiture, nettement supérieur dans l’espace de vie. Exclusivement horizontale, la circulation est définie selon 2 axes perpendiculaires. Le principal marque l’axe de symétrie centrale. Matérialisé par la porte d’entrée, il parcourt successivement les espaces principaux  : cour d’entrée, séjour, cour arrière.

Depuis l’espace de vie, un second axe traverse les parois latérales et rejoint les espaces secondaires. Ces derniers bénéficient d’un rapport privilégié avec l’espace extérieur, à l’abris de tout regard mais toutefois en contact avec les espaces extérieurs principaux. Ce dispositif relie divers degrés d’intimité tout en permettant de palier au sentiment d’enferment ou d’impasse.
Cette distanciation à l’environnement se manifeste par la recontextualisation subtile d’un paysage naturel  : 4 citronniers et des plans d’eau placés géométriquement suivant la composition. Cela forme un arrière-plan statique d’un décor scénique sophistiqué et place la maison en dehors de la réalité quotidienne.

Le contraste face à l’environnement ainsi que l’artificialisation sont renforcés par le traitement de la dalle au sol, dont l’épaisseur est lisible, telle une plaque perforée, un plancher, laissant voir la terre du sol originel. La texture du sol se replie verticalement, marquant la continuité de manière imagée. La nature devient ainsi abstraite et le contact direct à l’environnement est exclusivement vertical, avec le ciel et la terre. L’espace du séjour occupe ici une position centrale dans le plan. Sa toiture surplombante lui apporte également un statut particulier, principal. L’horizontal est accentuée, intégrant dans cette maison le principe d’indépendance et de flottement de la toiture. Un jeu compositionnel de volumes à différentes hauteurs s’instaure. Ce dispositif permet une monumentalisation du séjour  : en élevant ses murs au-dessus de l’enceinte, l’espace est amplifié, baignant dans la lumière «  lisse  » et homogène.

De toute évidence, le «  mysticisme de la lumière  » de Campo Baeza a une intention nostalgique. Dans le monde d’aujourd’hui, où chaque phénomène naturel a été irrémédiablement dégradé et corrompu – n’importe où sur la planète – un site «  vierge  » sur lequel construire est tout simplement un vœu pieux, qu’est ce qui pourrait être plus pur que le ciel  ? Pour Campo Baeza, il est littéralement le lieu où «  notre monde physique pénètre un monde au-delà  ». L’ensemble de la maison est sacralisé et détaché de son environnement.

Bien que notre atmosphère subisse les conséquences d’une urbanisation incontrôlée et que l’air autour de nous soit souvent très altéré, la vue depuis la maison – dont l’interaction avec le monde extérieur est régulée par des étendues de verre encadrées de panneaux muraux blancs – peut offrir une sublime perspective sur la vie. En ce sens, elle véhicule une «  nostalgie primitive  » et une plénitude spirituelle, pour un «  paradis d’identité  » rythmé par la lumière et l’obscurité, où la lumière du soleil, de la lune et des étoiles rendent visible l’espace. Il est clair que nous ne parlons ici de la création d’un univers artificiel et imaginaire capable de restaurer les harmonies que les Hommes modernes ont perdues dans leurs relations déformées avec le monde physique.

Campo Baeza renverse ici le précepte «  less is more  » de Ludwig Mies Van Der Rohe dans sa citation «  Más con menos  » (plus avec moins).

C’est une architecture qui, d’une part, se concentre sur les besoins de vivre liés à l’homme et à ses habitudes, insérant également le contexte, mis en valeur par la lumière naturelle (ici horizontale). Mais c’est aussi une architecture dont tous les éléments superflus sont supprimés, à la recherche d’une essentialité. Le résultat est donc une combinaison et une réduction des formes qui conduit à la conséquence extrême du refus de la décoration. Il en résulte une décoration qui est basée sur l’exemption de tout ce qui n’est pas nécessaire.

Cela m’a alors amenée à réfléchir sur le principe de la méditation  : La perception induite par un espace dépend notamment de notre sensibilité. Elle est bien évidemment subjective et personnelle. Notre impression sur l’atmosphère d’un lieu ne fait pas appel qu’au sens de la vue, mais aussi celui de l’ouïe, du toucher, de l’odorat. L’architecture offre un espace sensible, dans lequel l’individu évolue avec un regard sensible. De manière générale, dans le monde japonais (oriental), l’ombre, très présente dans les temples et espaces de méditation, est esthétisée, synonyme d’apaisement, de recueillement et de proximité avec les ancêtres.
La lumière fait partie intégrante de cette perception de l’espace. L’immatérialité de la lumière et la présence de l’architecture offrent un rapport dialectique, opposant éphémère et permanence à la perception sensorielle. Le but de la lumière dans ces espaces, n’est pas d’être un élément fonctionnel mais plutôt de mettre en évidence un élément artistique ou autre, et de pousser le visiteur à se plonger dans un état de méditation. Dans leurs nombreuses réalisations, Campo Baeza, Richard Meier, Tadao Ando ou encore Peter Zumthor, travaillent la matière et la lumière en fonction de leur vision propre. La lumière ou l’ombre, subliment l’ambiance du lieu et plongent le visiteur dans une phase méditative. Si ces moments de méditation sont possibles quel que soit l’endroit, car ayant le «  soi  » comme figure centrale, «  le fait d’extraire la personne de son milieu quotidien permet de faciliter le recueillement dans sa capacité́ de rupture face aux sollicitations et stimulations environnantes. L’isolement permet de se concentrer davantage sans être perturbé par ce qui nous entoure.  »

Commentaire  : Pascal Urbain

Bien que n’étant pas encore suffisamment illustrée par des schémas et des photos, l’analyse est très sérieuse et très bien documentée. Si on devait lui faire reproche, ce serait d’apparaître comme le «  journal officiel  » d’Alberto Campo Baeza. Il est toujours fécond, dans un deuxième temps, de prendre ses distances avec les propos d’un auteur. C’est un principe qu’il faut toujours avoir en tête  : l’intention d’un auteur – y compris soi-même – après qu’elle éclaire l’entendement, obscurci le jugement. Par bien des aspects, les «  intentions  » d’un auteur s’apparentent au «  circonstances atténuantes  » d’un inculpé  : il faut les connaître pour comprendre  ; elles ne suffisent pas pour juger.

Alberto Campo Baeza, 1946, Maison Gaspar, 1992.


Le projet reste à suivre. Je l’espère. N’ayant pas trouvé le site sur Street View, comme vous semblez le connaître, je serais heureux que vous m’en fournissiez l’adresse. Je ne me permettrais pas d’avancer une idée avant de mieux connaître l’endroit.

Léo-Pol Raud  ; Villa Stein, Le Corbusier, 1927

Léo-Pol Raud, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Le Corbusier, Villa Stein, 1927.


Commentaire  : Pascal Urbain

Malgré l’absence de texte développé, l’analyse structurelle est très sérieusement illustrée, malgré quelques planches aux couleurs criardes, pour un ensemble de 32 pages, dont 9 seulement sont reproduites ici. Il est également regrettable que les planches ne soient pas toutes exactement calées à la même place et à la même échelle. J’ai dû rectifier dans la planche ci-dessus. Ça n’est pas long mais c’est agaçant.

On reste en attente d’une esquisse.

Le Corbusier (1887-1965), Villa Stein, Garches, 1927, Infographie Xavier Martin, MVRDV et COBE, Musée Ragnarock, Roskilde, 2016, Collage Pur 2020.


Mon idée personnelle serait de remplir la boite éventrée. Je l’ai fait, ici, avec un projet de MVRDV.

Lilou Kreisberger, Maison De Blas, Alberto Campo Baeza, 2000

Lilou Kreisberger, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Alberto Campo Baeza, Maison De Blas, Esquisses, 2000.


Cette maison est une réponse à l’endroit où elle se trouve. En haut d’une colline au sud-ouest de Madrid avec une vue splendide au nord, à la sierra. On crée une plate-forme sur laquelle se loger, en construisant un tiroir en béton, comme un podium, sur lequel est posée une boite transparente en verre délicatement recouverte d’une structure légère et simple en acier peint en blanc.

La boite en béton enracinée dans le sol accueille un programme de logement avec un schéma clair de bande de services à l’arrière et des espaces servis devant. À l’intérieur s’ouvrent des espaces carrés qui encadrent le paysage qui semble ainsi s’éloigner. La boite en verre, sur la plate-forme, est un belvédère sur lequel on monte de la maison. À l’intérieur, le paysage est souligné, et il semble alors se rapprocher du spectateur. La boite en verre sans menuiserie sous la structure métallique, s’approche presque du bord de la façade nord et se remémore de la façade sud pour être à l’ombre. En bas, la grotte comme espace pour le refuge. En haut, la cabane, l’urne, comme espace pour la contemplation de la nature. La composition des supports, avec une double symétrie, collabore à donner un caractère statique, serein à la maison. Cette maison veut être une traduction littérale de l’idée de la boite tectonique sur la boite stéréo. Comme une distillation de l’essentiel de l’architecture. Encore une fois le plus avec moins.

«  Le dernier projet d’Alberto Campo Baeza construit un plan horizontal, comme les architectes grecs il y a des siècles. Avec poésie, précision et émotion.
Le plan le délimite par un podium et est souligné par une couverture blanche et légère. Les deux murs horizontaux construisent un espace horizontal plein de nature et de lumière.
Le podium stéréoscopique en béton, où se développent les fonctions propres de dormir et manger, organisées de manière claire avec un front au nord d’éléments servis et un dos au sud d’éléments serveurs, et la tectonique de la couverture, en acier et en verre où, en profitant des vues de l’horizon lointain et de la nature immédiate, se propose la zone de vivre et de penser. Pour regarder et rêver.

Il est utilisé dans cette maison le mécanisme efficace d’opérer par contraste, pour trouver dans l’opposition les meilleures qualités spatiales et matérielles possibles. Le prisme en béton, d’aspect fort, catégorique et négligent, «  imparfait dans son apparence  », selon les mots de Sota, en rappelant une visite de Le Corbusier à son Unité d’Habitation de Berlin, exprime clairement le matériau et sa construction.

La Nature est incorporée dans ce volume sous la forme de trois situations distinctes. Nature abstraite dans la lumière et dans le ciel depuis les petits et les hauts creux situés au sud. Nature transformée dans les reflets que produit le volume d’eau excavé à l’une des extrémités. L’eau, qui apparaît aussi dans la maison Gaspar, établit un subtil équilibre entre le plan créé (le podium), et le plan soutenu (la couverture).

Et Nature encadrée à l’intérieur du mur à travers les trous au nord pratiquées en elle. Seulement un d’entre eux change ses dimensions. Le couvercle en acier est un plan capable de créer de l’espace et la boite en verre le conditionne. Le plan est soutenu par huit colonnes en acier à double profil de section U dans un tiroir à 226 cm du plan du podium. Plan et colonnes sont entièrement peints en blanc. La «  table blanche  » ainsi formée, en contraste avec le podium en béton, montre une construction précise et parfaite, – en continuant le rendez-vous de Sota, réalisé presque «  par des Allemands toujours à la perfection  ».

La nature est présente ici dans tout l’espace. Si de l’intérieur du podium «  on regarde le paysage  », sur lui «  on regarde le paysage  ». De cette façon, il n’est pas possible de séparer le podium du plan.

Parce que la compréhension de l’espace de l’un est étroitement liée à l’expérience de l’espace de l’autre. Comme un bateau exalte le paysage marin, comme le disait Oiza, la maison Blas loin de détruire le paysage l’exalte en proposant une manière différente de l’expérimenter.
Immergé dans la nature, dans une parcelle orientée nord et avec plus de quatorze mètres de dénivelé, sa perception à l’arrivée est réduite au plan blanc flottant pour, comme il monte, découvrir le prisme en béton et contempler enfin dans toute sa splendeur le plan suspendu par la lumière.

L’intensité spatiale définie entre les deux plans est brutale. Dans de petites dimensions se produisent de nombreuses situations spatiales différentes (eau, extérieur, extérieur-couvert, intérieur-extérieur) dont les limites apparaissent floues et confuses. Ces limites dans la maison Gaspar sont construites et claires et pourtant la continuité de l’espace est présente. Dans les deux maisons se construit, sans plis ni fractales, un espace continu et horizontal où la nature acquiert une importance extraordinaire.

L’expérience de l’espace continu et horizontal est intimement liée à l’incidence de la lumière sur ses limites. La boite en verre devient ainsi une «  boite de murs  » avec de la matière, totalement opaque, lorsqu’elle est observée dans son plan, ou disparait en convertissant l’intérieur en extérieur en regardant perpendiculairement à lui et en devenant totalement transparente. En outre, il se détache du podium en se déplaçant vers le nord, avançant vers le paysage lointain de chênes verts et de montagnes.

Que ce soit entre des murs verticaux ou entre des murs horizontaux, en créant la nature ou en partant d’un plan horizontal qui existe déjà̀ ou en le créant là où il n’y en a pas, Alberto Campo Baeza introduit dans ses œuvres la valeur intemporelle de l’architecture. Au-delà̀ des époques, des modes et des styles, en survolant le temps, il construit un temple grec aux portes du vingtième siècle et transforme son «  cella  » fermé, massif, sombre et secret des dieux en une boite transparente et lumineuse pour le plaisir de l’homme.

Construisez un plan horizontal pour flotter dans l’air.

De lui on a accès au ciel, aux nuages, à la brise. À la lumière.  »

Raúl del Valle González, Continuidad y naturaleza en la arquitectura de Alberto Campo Baeza
https://www.dropbox.com/sh/mmw93tmk8fhh4s3/AABayJkTO8cdVe01SiuMCTMCa/01_Textos?dl=0&preview=Casa+de+Blas_Continuidad+y+naturaleza.doc&subfolder_nav_tracking=1
Traduction Lilou Kreisberger, 2020.

Commentaire  : Pascal Urbain

Alberto Campo Baeza, Maison De Blas, 2000, Trames, Pur 2020.


Vous avez trouvé un très beau texte sur Alberto Campo Baeza. Ce n’est pas rien. Mais il manque une analyse plus technique, avec des documents graphiques. Je vous propose une piste de travail  : analyser les trames et les rythmes.

Dans les esquisses, le projet a été plusieurs fois tramé, tantôt avec une division en 4, tantôt avec une division en 7, parfaitement symétrique, puis dissymétrique en 8 travées, pour ajouter un bassin, je suppose. Finalement, la trame régulière a été abandonnée. Ça n’a rien d’extraordinaire : la mise au point technique d’un projet conduit souvent à des amendements qui brisent la régularité réelle.

En la circonstance, cette mise au point donne au projet un certain raffinement. La trame du haut, par exemple, semble presque régulière, mais ne l’est pas  : A+B n’est pas égal à C, il suffit de compter les modules de la terrasse pour le vérifier. Je vous laisse poursuivre. L’intérêt d’une telle analyse, c’est de montrer qu’un projet n’est jamais fini, qu’il a évolué et qu’il peut évoluer encore. Rien n’interdit alors d’ajouter une fausse trame en plus… Le projet s’ensuivra.

Lisa Rusterholtz  : Villa de Ville, Office KGDVS, 2012

La conclusion de l’analyse de l’Histoire d’un pauvre riche sert d’introduction au travail de projet. Elle est reproduite ci-dessous.

Ce que (le texte d’Adolf Loos) nous apprend réellement, c’est une manière de concevoir, de penser mais aussi et surtout ressentir. Comment se sent on dans une pièce  ? Quoi ajouter pour harmoniser le tout  ? C’est exactement l’exercice auquel nous sommes confrontés.

Je vous parlerai alors de mes premières recherches pour le projet que nous avons à réaliser.
J’ai commencé par relever les consignes que vous nous donniez, vous disiez qu’il faut «  rechercher, non seulement leurs évidentes qualités, mais aussi bien leurs vices cachés  ; et y remédier par le projet d’un petit espace de méditation, provisoirement adjoint au chef d’œuvre que vous allez joyeusement (et provisoirement) massacrer  » en parlant de nos bâtiments. En ne faisant pas l’erreur «  d’identifier ce qui, à part l’architecture, ne va pas dans telle ou telle maison  ». Puis, il faut «  traquer les vices internes à la discipline, ni plus ni moins que Colin Rowe, quand il montre les difficultés de Le Corbusier qui, en se libérant du plan, se retrouve captif de la coupe  ». Enfin, «  il n’y a pas d’œuvres parfaites, et s’il y en avait, elles seraient aussi haïssables que la maison du pauvre riche  ».

Mon bâtiment est la Villa de Ville de KGDVS.

J’ai commencé par m’intéresser de plus près à KGDVS. Il s’agit d’un acronyme de Kersten Geers David Van Severen, qui est une entreprise fondée en 2002 par Kersten Geers et David Van Severen située en Belgique. Elle est réputée pour son architecture idiosyncrasique, où réalisations et projets théoriques se côtoient. L’entreprise réduit l’architecture à son essence même et à sa forme la plus originale  : un ensemble limité de règles géométriques de base est utilisé pour créer un cadre dans lequel la vie se déroule dans toute sa complexité.
Puis je me suis intéressée à mon bâtiment.
Il se situe au centre de Bruxelles, en Belgique. Un morceau de paysage, vert, ouvert, idyllique, comme s’il était en marge de la ville, mon bâtiment se trouve au milieu d’elle. Afin de doubler la surface d’une maison apparemment indépendante dans cet environnement étrangement luxuriant, il a été décidé de souligner avec élégance l’existence de tout ce qui existait déjà, de faire disparaître simultanément l’ajout en le rendant extrêmement visible. Le nouvel ajout est projeté sous la maison existante, n’ajoutant aucun nouveau volume, mais créant efficacement son piédestal. Le piédestal transforme la maison existante en objet exposé  : entretenu, nettoyé et restauré, défait de son importance d’origine. La maison existante devient une maison de nuit, une maison fantôme au sommet d’une nouvelle villa excavée.

Office KGDVS, Villa de Ville, Bruxelles, 2012.


La villa est à la fois neuve et ancienne. C’est une maison conçue comme un ensemble de différents espaces tracés par des colonnes. Le rythme des colonnes définit le plan et la séquence  : un ensemble d’espaces qui ne sont pas définis comme étant fonctionnels. La villa se présente comme un vestige d’une maison  ; un ensemble d’éléments tectoniques créant différentes hiérarchies spatiales. Parfois, les espaces sont ouverts sur le ciel  ; parfois, ils obtiennent leur lumière indirectement.

La structure se traduit par une idée spatiale. Les colonnes en béton deviennent des colonnes en bois tâchées dès que l’on traverse de l’intérieur vers l’extérieur, créant effectivement une construction spatiale, une séquence spatiale de lieux de séjour hypothétiques.

Office KGDVS, Villa de Ville, Bruxelles, 2012.


La villa existe ainsi dans l’île verte qui est maintenue par son existence même, une contribution consciente à un tissu urbain en voie d’extinction.

Office KGDVS, Villa de Ville, Bruxelles, 2012.


Voici donc mon début de projet. J’ai commencé par dessiner le bâtiment, nous plusieurs angles, vue de haut, côté, devant… Puis l’intérieur. L’espace qui m’a le plus intriguée fut celui-ci  :
En effet, il s’agit d’un espace avec toit ouvert, qui ne donne aucune réelle information sur sa fonction. J’ai alors dessiné le cadre, et ai imaginé une chose qui pourrait servir à la méditation. J’ai commencé par penser à une fontaine, car le bruit de l’eau apaise, aide à se concentrer. Je voulais aussi une forme circulaire, car cet espace est rectangulaire. C’est alors qu’ont émergé ces dessins  : Une forme ronde, dans un espace rectangulaire, et j’y ai ajouté des «  jets  », pour les jets d’eau d’une potentielle fontaine. Mais cette forme m’était familière. Une pomme.
C’est pourquoi j’ai décidé d’intégrer une pomme au milieu de cet espace vide et lumineux.

Office KGDVS, Villa de Ville, Bruxelles, 2012, et Lisa Rusterholtz, 2020.


Bien sûr ce projet n’est pas définitif, je voulais simplement vous faire part de ma première idée qui a émergé après de longues heures d’admiration des images et des plans dont je disposais.
L’idée de la pomme peut paraître quelque peu farfelue, mais j’ai trouvé un texte très beau et très contemplatif de la pomme, qui fait penser à une méditation. Méditer sur la vie, les choses simples de notre vie quotidienne  :
«  Une semaine, j’étais tranquille chez moi, un midi, c’était une journée d’écriture, et j’avais décidé de jeuner, pour me nettoyer un peu le corps et l’esprit. Pas un vrai jeune intégral, mais un allégement de mon menu. Et ce midi-là, mon menu, c’était une des belles pommes que j’avais achetées au marché le dimanche précédent. J’avais décidé de déguster ma pomme en pleine conscience, tranquillement, comme nous devrions le faire régulièrement avec nos aliments. Je me suis assis à la table de la cuisine, et j’ai commencé par la regarder, la faire tourner dans mes mains, l’admirer, avec sa belle peau jaune et rouge. Je l’ai un peu reniflée, je l’ai passée sur mes lèvres, puis j’ai croqué dedans, juste une bouchée. Cette bouchée, j’ai pris tout mon temps pour la savourer, tout mon temps pour en explorer les arômes, tout mon temps pour la mastiquer et l’avaler, sans rien faire d’autre, avant de croquer une deuxième fois. Puis, j’ai dégusté lentement chacune des bouchées. C’était hyper-zen, j’adore ce genre d’exercice de méditation, qui consiste à manger ce que nous mangeons d’habitude, mais tranquillement, l’esprit et les sens ouverts, en pleine conscience. Au bout de 10 minutes, j’avais terminé ma pomme. J’ai pris encore un peu de temps pour me régaler des dernières saveurs qui s’attardaient dans ma bouche, des derniers fantômes de son goût, du sillage de tout ce qu’elle m’avait offert. Un peu de temps aussi pour écouter ce que me disait mon ventre, pour voir si cette lente dégustation de la pomme l’avait rassasié. Mon ventre m’a dit que c’était OK, et que nous pouvions en rester là.  » Christophe André.

Commentaire  : Pascal Urbain


Yayoi Kusama, Citrouille, Naoshima, 1994.


À vrai dire, vous avez eu une excellente idée. Elle n’est pas le moins du monde farfelue – sauf à discréditer également une grosse moitié de l’art contemporain, ce qui me tente… – mais bien référencée, bien installée dans son patio, élégante et, cerise sur la pomme, assez facile à dessiner. Le reproche qu’on peut faire à ce projet est strictement pédagogique  : même parfaitement réussi, il ne démontrerait pas la compétence architecturale espérée en fin de première année.

Kengo Kuma, Oribe Pavillion, Ortigia, Syracuse, Pur 20130720.


A minima, il faudrait que ce fut un projet construit et habitable, ne serait-ce qu’un fauteuil. Et plus sérieusement, un objet qui, dans un patio, c’est-à-dire un dehors-dedans, puisse être un dedans-dehors qui bataille avec la trame régulière du projet de KGDVS.

Marion Panciatici  : Maison de vacances, Office KGDVS, 2012

La maison qui m’a été attribuée est la maison de vacances de l’office KGDVS. Cette maison est une maison isolée qui a été construite de 2014 à 2017. Comme son nom l’indique c’est une maison de vacances contemporaine qui est située en Espagne plus précisément à Matarranya. Elle est ronde et possède une surface de 550m2 sur un terrain de 92889 m2. Grâce au plan on sait que la couronne (c’est-à-dire l’espace habitable) fait 5m de large et que l’espace intérieur (jardin) fait 36m de diamètre.

Les architectes qui ont réalisé cet ouvrage sont l’OFFICE Kersten Geers David Van Severen Architects en association avec Diogo Porto Architects. On peut se demander pourquoi ils ont choisi de faire une forme ronde dans un endroit aussi reculé. Quel est l’intérêt de cette forme si particulière  ? Posée comme un ovni au sommet d’un plateau dont elle épouse la forme arrondie. Constituée d’un anneau de béton au toit plat, la forme que l’on découvre, puis arpente, défie l’idée même d’habitation. Son centre, vide, est un vaste patio, tandis que les pièces à vivre sont réparties en périphérie. Agencées autour d’un patio central, les pièces de vie s’ouvrent sur l’extérieur, donnant l’impression qu’intérieur et extérieur se confondent. Montée sur un rail mobile, la façade extérieure circulaire peut s’ouvrir en grand  ; une brise légère traverse alors l’anneau de part en part, soulevant sur son passage des voilages argentés. On se demande parfois si on est dedans ou dehors, il se passe toujours quelque chose en relation avec le soleil, le vent, la vue etc. Avec ses quatre blocs à vivre de 60 mètres carrés chacun, une cuisine, une salle de bains et deux chambres, répartis selon une orientation Nord- Est/Sud-Ouest, la maison fonctionne vraiment bien, La lumière change en permanence. «  Nous avons voulu faire en quelque sorte disparaitre cette construction dans la nature.  » dit un des architectes. Pour ce qui est des matériaux, Ses façades sont faites de panneaux ultralégers qui peuvent coulisser intégralement. Seuls une volée de rideaux, quelques panneaux en Inox amovibles, où vient se réfléchir le paysage, et des claustras extérieurs en aluminium presque transparent modulent et définissent l’ouverture, la fermeture et l’intimité de cette boucle de verre. Tous les sens sont sollicités  : son intérieur est extraverti, son extérieur introverti. Bien à l’abri dans sa chambre, on a la sensation de dormir à la belle étoile. A contrario, dans son patio central de mille mètres carrés, on a l’impression d’être dans le cocon protecteur d’un salon. Et, pour aller de pièce en pièce, il ne viendrait à personne l’idée de rompre la magie du cercle. On suit docilement sa promenade architecturale, tournicotant de la cuisine au salon, du salon à la chambre… comme emporté par une folle farandole où nature et maison font corps. En plus d’avoir toutes ces qualités de construction la maison est respectueuse de l’environnement puisqu’elle est autonome en eau et en énergie et tous les éléments qui le permettent sont installés sur le toit (panneaux solaires, générateur, réservoir…).

Marion Panciatici, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Office KGDVS, Maison de vacances, 2012.


On a bien compris l’intérêt des architectes à faire une maison avec une forme aussi particulière, tout y est pensé au millimètre c’est pourquoi l’implantation du projet d’un espace de méditation se fera plutôt dans le patio central. Comme il a été dit ci-dessus le patio central nous donne l’impression «  d’être dans le cocon protecteur d’un salon  » ne serait-ce pas l’endroit idéal pour méditer  ? Dans cet endroit si paisible il ne faut surtout pas aller à l’encontre de la nature c’est pourquoi l’espace sera délimité par des «  barrières naturelles  » telles que des rochers des arbustes etc. ainsi l’espace de méditation ne sera ni fermé ni ouvert ce qui pourra rappeler la maison mais surtout laisser ce lien entre la nature et la personne qui souhaite méditer. De ce fait le sol sera simplement la terre naturelle et l’espace sera à ciel ouvert pour se sentir au plus près de la nature et pouvoir développer nos sens (l’odorat, le toucher) tout en méditant. L’idée serait de placer cet espace au centre du patio pour ne pas entraver la forme parfaite de l’ouvrage et serait accessible grâce à un seul chemin de pierre afin de le mettre en valeur l’entrée de l’espace mais aussi d’intriguer sur son utilité.

Commentaire  : Pascal Urbain

Office KGDVS, Maison de vacances, Matarranya, Espagne, 2012.


Votre projet, tel qu’il est décrit, me semble très légitime. Mais au vu de votre première esquisse, je dois vous mettre en garde le plus clairement possible.

Petit pavillon de la Villa Katsura, Kyoto, 1615-1662, Pur 20151024.


D’abord, un jardin n’est jamais la nature. Dans un site qui, à défaut d’être une forêt primaire, est aussi près de la vraie «  nature  » qu’on peut l’être en Europe, le jardin intérieur se doit d’être contre la nature, un espace artificiel. Allez donc voir les jardins japonais et chinois  !

L’art des jardins est une discipline à part entière. Si vous n’y êtes déjà formé – votre première esquisse tend à la montrer – vous ne serez pas capable de produire un projet recevable. Sauf informations dont je ne disposerai pas, je vous déconseille formellement de poursuivre dans cette voie.

Saint Luc le Stylite, Menologion de Basil II, onzième siècle.


En solution de repli, je vous propose une vision  : décentré dans le cercle du jardin fermé, imaginez un stylite, un ermite vivant au sommet d’une colonne d’où il domine le grand paysage aride  ; mais attention, c’est un stylite moderne, car sa colonne est un ascenseur pour une seule personne  ; une échelle permet de descendre en cas de panne.

Didier Faustino, Habitat pour une personne, 2003, AA 354.


Un projet artistique de Didier Faustino, sans ascenseur, peut être un premier jet.

Maxime Grégoire  : Villa Savoye, Le Corbusier, 1929-1931

Bonsoir,

Dans ce mail je vous envoie mes analyses de la villa Savoye du Corbusier ainsi que les analyses des textes d’Adolf Loos.

Pour ce qui est des analyses architecturales, j’ai tenté de présenter l’analyse à la façon des exemples présentés sur votre site Avec l’Architecture. J’ai donc constitué des dossiers contenant des images format .jpg à faire défiler. J’ai donc pu me familiariser davantage avec Photoshop.

Ensuite, lorsque j’ai voulu faire une analyse de façades, j’ai commencé par identifier les rythmes verticaux, à chercher les grandes lignes directrices puis j’ai essayé de chercher les proportions du nombre d’or dans cette villa (il est bien connu que Le Corbusier travaillait beaucoup avec les proportions du nombre d’or qu’il considérait comme idéales) mais je n’ai rien trouvé sur internet pour approfondir ces analyses de façades qui m’ont révélé un petite étrangeté avec les proportions du nombre d’or sur l’une des façades : c’est pourquoi j’ai ensuite regardé ce qui était prévu dans le dessin initial de façades grâce à la coupe et l’élévation que vous m’avez fournis.

Je n’ai pas écrit de texte pour accompagner l’analyse donc je vais faire un petit résumé synthétique  : cette villa se situe à Poissy, un peu en dehors de Paris, elle porte le nom de ses propriétaires initiaux qui ne l’occupent pas très longtemps car la maison va être réquisitionnée pendant la Seconde Guerre Mondiale d’abord par les nazis, puis par les Alliés. A l’issue de la guerre, le terrain va être amputé de 5 hectares sur 6 pour la création d’un lycée public, la villa devient alors une sorte d’espace culturel avant d’être abandonnée puis rénovée dans les années 60 pour être classée monument historique (alors que Le Corbusier est encore vivant). Elle est composée de trois niveaux. Le rez-de-chaussée qui abrite principalement les chambres des domestiques, le premier niveau qui abrite la vie de la famille Savoye et troisième niveau, une terrasse destinée au jardinage et aux «  bains de soleil  ». Cette villa est composée par un plan libre formé par les nombreux poteaux. Pour image, la maison est posée au-dessus des chambres des domestiques par des pilotis. Le Corbusier la qualifiera de «  machine à habiter  » car il étudie les déplacements au sein de la maison et la répartition des fonctions selon les différents usages et de façon très hiérarchisée pour limiter les rencontres entre domestiques et maîtres  : ils sont comme les engrenages qui portent le poids du foyer mais qui ne doivent rester discrets.

Maxime Grégoire, Analyse de la Villa Savoye, ENSA-M S2 2020, Poissy, 1929-1931, Le Corbusier (1887-1965).


Maxime Grégoire, Analyse de la Villa Savoye, ENSA-M S2 2020, Poissy, 1929-1931, Le Corbusier (1887-1965).


Maxime Gérgoire, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Le Corbusier, Villa Savoye, 1929-1931.


Commentaire  : Pascal Urbain

Excellent travail d’analyse graphique. Il ne manque plus qu’une analyse pittoresque et un projet

S’agissant du projet, les croquis 1 et 3 sont habiles, intelligents et assez faciles à faire. Vous pourriez corser le jeu en imaginant des boites dans la boite, un tant soit peu transformables. Imaginez une vigie en 1, qui ne dépasse pas de l’épure corbuséenne, mais qui, montée sur vérins, peut s’élever à certains moments. Imaginez des cloisons repliables en télescopique en 3, qui assurent le clos et le couvert mais qui peuvent revenir à l’état originel.

Le Corbusier (1887-1965), Villa Savoye, Pavillon du gardien, Poissy, 1929-1931.


En solution de repli, considérez la loge du gardien, qui est une sorte de «  Savoyette  » dont on se demande si ça n’est pas un photomontage. Considérerez l’ensemble du terrain, de la parcelle, et cherchez un bel endroit calme pour une Savoyenitta en rondins.

Sara-Lou Pons  : Villa Der Bau, Office KGDVS, 2013-2015

Sara-Lou Pons, Esquisse pour un lieu de Méditation, ENSA-Marseille, S2 2020/04/23, Office KGDVS, Villa Der Bau, 2015.


La construction d’une villa selon les principes de QNE, quasi neutre en énergie. La maison est chauffée par une pompe à chaleur géothermique lié au chauffage par le sol et chauffage mural. Toutes les zones sont individuellement réglables. Tous /es espaces sont aérés par un système de ventilation mécanique avec récupération de chaleur, aussi bien sous forme de chaleur sensible que latente. En été l’air de ventilation et les systèmes de climatisation sont refroidis par l’énergie froide gratuite de la géothermie.

La base du bâtiment, qui est à moitié submergée dans le relief ascendant, est formée par une grille compacte de pièces, organisée en enfilade à travers des portes doubles centrales. La grille est coupée pour créer des espaces ouverts, comme des niches aux extrémités du plan, qui sont laissés pour la plupart ouverts vers l’extérieur. Au dernier étage, le même plan est répété, mais alors que le sous-sol est une construction traditionnelle de briques et de béton, le plancher supérieur se compose de panneaux de bois massif. Ces panneaux sont structurellement reliés afin de créer une structure extrêmement rigide et gaufrée, supportée uniquement par une poignée de colonnes.

Cela permet à l’étage intermédiaire d’avoir un plan d’étage ouvert, unissant cuisine, salle à manger et salon dans un espace sinueux continu. Un ensemble de cinq «  boîtes  » compactes, reliées par des fenêtres coulissantes, contient des espaces auxiliaires et les connexions aux autres étages tout en fonctionnant comme des supports structurels. Les surfaces vitrées suspendues entre elles peuvent s’ouvrir complètement pour relier l’espace de vie directement au paysage qui l’entoure. Comme un geste ultime soulignant la nature privée du site, les espaces les plus intimes sont poussés aux extrémités du plan, et sont encadrés de grands panneaux de verre vers le paysage.

Le sous-sol et le dernier étage partagent le même plan de base, mais sont construits de différentes façons  : le sous-sol est fait de briques traditionnelles, peint en blanc avec de la chaux. Cependant, le plancher supérieur est construit en panneaux CL T préfabriqués (bois lamellé-collé), qui sont structurellement interconnectés pour créer une rigidité. En conséquence, le plancher entre les deux est complètement ouvert, sauf pour les fenêtres coulissantes et quelques boîtes d’armoire qui contiennent les supports structurels. En ce qui concerne les finitions, le sol habitable reprend les aspects du sous-sol et du dernier étage, combinant les finitions minérales et bois.

Commentaire  : Pascal Urbain

Vos documents sont propres et nets. L’analyse est bonne mais manque de dessins analytiques.

Office KGDVS, Villa Der Bau, Linkebeek, 2011-2015.


Une superposition structurelle serait utile. Quand on quand on superpose un niveau quadrillé et l’étage de traviole, et qu’on marque en rouge les points supports, c’est maigre, ça marche, mais le niveau haut doit être très léger pour tenir sur de rares points porteurs.

Office KGDVS, Villa Der Bau, Linkebeek, 2011-2015.


Pas de projet pour l’instant  ?

D’après Office KGDVS, Villa Der Bau, Linkebeek, 2011-2015.


Il y en a un d’évident, très facile, un peu bas de plafond en version de base.

Eureka  ! Chambre d’Archimède, d’après Office KGDVS, Villa Der Bau, Linkebeek, 2011-2015, et Arch Studio, Maison de campagne, 2019.


Mais il est facile à enrichir, de plusieurs façons, si on s’étend d’une trame carrée en avant, dans le grand près, avec un peu de bois doré par le soleil.
Oserez-vous la facilité  ? Elle est un don des Dieux…